Session extraordinaire. Vague de réfugiés en Europe et contrôles aux frontières

Notre session extraordinaire porte sur sept interventions parlementaires provenant de toutes les formations du Parlement, sur des thématiques très diverses. Il nous est très difficile de trouver une unité de matière dans toutes ces interventions. On risque de provoquer un amalgame assez tragique entre asile, sécurité et terroristes. Quoiqu’il en soit, je vais vous donner les déterminations du groupe socialiste. Pour les motions Grunder 15.3141 et du groupe PDC 15.3999, le groupe socialiste partage l’avis du Conseil fédéral, qui propose de rejeter ces motions, qui sont louables sur le fond, mais qui ont déjà été prises en compte par le Conseil fédéral. Je vous invite donc à les rejeter.

Concernant la motion 15.3801 du groupe libéral-radical, qui souhaite ne plus accorder aux Erythréens le statut de réfugiés mais plutôt le statut S, celle-ci soulève trois problèmes. Premièrement, elle n’est pas eurocompatible: une protection temporaire devrait être mise en oeuvre au niveau européen, or, la Commission européenne a refusé de mettre en place cette protection temporaire, qu’on nomme en Suisse la protection provisoire. Deuxièmement, c’est une décision politique: en droit d’asile, on a besoin de clarté et de simplicité, surtout quand les choses sont compliquées. En l’occurrence, on ferait ici un bricolage juridique de plus, alors que la situation nécessite qu’on ne multiplie pas les statuts. Troisièmement, c’est une bombe sociale à retardement. Si vous mettez en place une protection provisoire, uniquement discriminatoire pour les ressortissants d’Erythrée en l’occurrence, vous aurez à terme d’énormes problèmes d’intégration, alors que justement il faut intégrer ces personnes le plus vite possible.

Enfin, sur la motion du groupe UDC 15.3842 pour un contrôle systématique aux frontières, j’aimerais d’emblée indiquer que l’UDC doit vraiment réfléchir avant de déposer des motions irréalistes et impossibles à mettre en oeuvre! Maintenant que l’UDC est pleinement engagée dans les responsabilités gouvernementales, le groupe doit vraiment se poser la question de savoir comment il est capable d’analyser une situation complexe, comment il est capable de travailler collectivement pour trouver des solutions réalistes. En l’occurrence, ici, les contrôles systématiques proposés sont impossibles à mettre en oeuvre, vous le savez très bien; il n’y a pas d’alternative à Schengen, puisqu’un contrôle systématique signifierait le contrôle de quelque 750 000 personnes, 350 000 véhicules qui franchissent les frontières chaque jour, une distance à surveiller de 1900 kilomètres, 75 000 personnes dans les aéroports suisses – rien que pour Bâle, il y aurait 60 000 contrôles quotidiens à faire. Et je vous rappelle, comme cela a été dit, qu’avant Schengen il n’y avait déjà plus que 3 pour cent des passages qui étaient contrôlés. Tout contrôle de manière systématique serait impossible, avec ou sans Schengen. Je vous rappelle également – Monsieur Hurter y a fait référence – qu’il ne s’agirait pas de quelques minutes d’attente aux frontières, mais du blocage complet des infrastructures, des hôpitaux, du travail de tous les frontaliers. Avec cette mesure, vous bloqueriez toutes les régions qui bénéficient actuellement, comme à Bâle ou à Genève, d’un certain nombre de frontaliers pour faire fonctionner leurs hôpitaux et toutes leurs infrastructures.Vous proposez une motion qui est au demeurant très dangereuse parce qu’elle conduirait à terme à dénoncer l’accord de Schengen. Je vous rappelle que si la France et l’Autriche ont effectivement mis en place des contrôles, ceux-ci sont temporaires et non permanents, or, votre motion demande des contrôles permanents, ce qui est contraire au code frontières Schengen. Je vous demande de relire l’article 23 du code frontières Schengen; vous savez très bien que la mesure proposée est clairement contraire à ce code frontières et qu’agir ainsi, comme la motion le préconise, provoquerait une dénonciation potentielle de cet accord d’association.

Ensuite, j’aimerais juste ajouter un élément concernant l’asile, plus précisément le phénomène de masse et de long terme que nous aurons à gérer dans ce domaine. La Suisse doit évidemment intensifier sa coopération avec des mesures intelligentes qui soient combinées pour obtenir les bons effets. Et c’est par l’ensemble de ces mesures qu’on peut réguler les mouvements migratoires et démontrer à la population que ces mouvements sont sous contrôle. Il faut des mesures qui soient défendues au niveau de la révision de la loi sur l’asile pour qu’il y ait plus de restructurations et plus d’accélérations des procédures; il faut une coopération plus grande dans le cadre de Dublin IV avec des compétences européennes renforcées pour reconnaître le statut de l’asile via le Bureau européen d’appui en matière d’asile; il faut des programmes intensifs d’intégration. Cela a été dit par Monsieur Nidegger, il n’y a pas assez d’intégration pour les personnes au bénéfice d’admissions provisoires, il n’y a pas assez d’intégration pour les réfugiés, et il faut des programmes massifs d’intégration pour ces personnes qui, quoi qu’il en soit, vont arriver.

Surtout, ce qui est particulièrement choquant dans ce débat, c’est qu’on dirait que la Confédération ne fait rien alors que, justement, elle a mis en place avec les villes, avec la totalité des communes, avec les cantons, avec les conférences intercantonales, un ensemble de dispositifs extrêmement fort qui fonctionne actuellement. Je vous rappelle que tout demandeur d’asile est enregistré et que le Service de renseignement de la Confédération effectue des contrôles systématiques pour toutes les demandes d’asile.

Références et liens

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Parlement suisse
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